C’est le matin, ce jour où chacun est censé pouvoir se reposer un peu plus que d’habitude, même ceux qui, toute la semaine, sont noyés dans l’ennui des jours sans occupation. Car c’est dimanche, et déjà dans les rues de la Gueule-Tapée, les enfants crient, courent, conduisent des voitures imaginaires et pilotent des avions fictifs. Les femmes, par groupes, sur le chemin du marché, racontent tour à tour les potins de la veille avec de retentissants éclats de rire. Déjà, dans la cour des maisons, de braves jeunes filles assises devant de grandes bassines d’eau lavent les assiettes et récurent les marmites dans un concert discordant. Et chez tante Ngoné, Bakar s’étire sans cesse dans son lit et redécouvre que vraiment rien ne change, même pas le dimanche.
– Impossible de dormir ici, grommela-t-il, en même temps qu’il posait les pieds par terre. La chambre était bien claire malgré l’heure – il n’était que sept heures du matin – et lorsqu’il ouvrit la fenêtre pour humer l’air, il sentit qu’il ferait encore chaud ce jour-là.